– par Sylvie Hagiwara –
Suite au séminaire de mai 2008 à Evian, j’ai éprouvé le désir d’expérimenter le Reiki avec un malade Alzheimer.
C’est en qualité de bénévole France Alzheimer que j’ai, une nouvelle fois cette année, participé à un séjour vacance regroupant 12 couples (malade et conjoint), 8 bénévoles et 2 aides-soignants salariés.
Pour cette expérience, j’ai choisi Paulette la femme de Jacques, un ami à qui j’ai demandé de bien vouloir me mettre par écrit ses impressions en fin de séjour. Je précise que je ne connaissais pas Paulette avant ce séjour.
Paulette
Paulette est une femme de 72 ans, souriante, aimant rire, toucher et embrasser. Elle tient des conversations incohérentes, déambule toute la journée, attrape tout ce qui se présente à elle et converse avec les gens qu’elle croise.
Le projet
Durant ce séjour et en accord avec Jacques, j’ai donné tous les jours un soin Reiki à Paulette et tous les matins je lui ai envoyé un Reiki à distance. Elle a donc reçu une vingtaine de soins.
Je vous livre à présent mes impressions sur cette expérience sachant que Paulette recevait en plus de ces soins Reiki de nombreuses autres stimulations du fait du contexte particulier et privilégié dans lequel j’expérimentais.
Les soins Reiki
Lors des premiers soins, Paulette riait très fort et attrapait mes mains lorsque je « scannais » son corps. Elle était très dispersée, cherchait à se lever, me parlait sans cesse, bougeait beaucoup. Puis au fur et à mesure des séances j’ai senti qu’elle savait qu’en venant dans ma chambre elle aurait un soin qui lui apporterait beaucoup de bien et de douceur. Un jour elle m’a fait comprendre qu’elle souhaitait que je pose ma tête sur sa poitrine et m’a dit « viens », alors j’ai posé délicatement ma tête entre ses deux seins et elle m’a dit « oui, c’est bien » et depuis ce jour elle a toujours souhaité que je commence le Reiki comme cela. De cette position lorsque je mettais mes mains sur ses oreilles, elle massait mon oreille et lorsque je mettais mes mains sur son cou, elle massait mon cou et cela a continué comme cela pour tout le corps. Je m’arrangeais donc pour qu’elle puisse toujours me toucher la partie du corps que je lui touchais et quand je mettais mes mains sur ses jambes ou sur ses pieds, il me fallait m’allonger auprès d’elle en inversé pour qu’elle puisse elle aussi masser mes jambes et mes pieds C’était un toucher très doux, très appliqué et attentif. Je me sentais dans un cercle parfait, du donner-recevoir inconditionnel.
Lors du 1er soin elle était particulièrement agitée, mais dès le 2ème soin elle était déjà plus calme. Vers la fin du séjour elle était sereine. Elle ne cherchait plus à attraper mes mains ni à se lever mais elle fermait les yeux tout en me massant et sans jamais s’arrêter.
A la fin de chaque Reiki je lui demandais si elle était contente si cela lui avait fait du bien. Au début elle riait et m’embrassait sans parler ou en me disant des phrases incohérentes. Puis vers la fin du séjour elle me disait « oui c’est bien » et ajoutait « je suis contente ».
Les conversations
Paulette parle souvent seule de manière incohérente, répétant toujours les mêmes phrases. Elle aime parler lorsque vous vous approchez d’elle ou lorsqu’elle rencontre quelqu’un.
J’ai constaté au fur et à mesure du séjour, qu’elle me disait de plus en plus de petites phrases très cohérentes et très à propos : à plusieurs reprises elle m’a dit « oh, excuse-moi » lorsque maladroitement elle me cognait le visage avec sa main. Une fois, lorsque je la promenais, une voiture s’est avancée vers moi et elle m’a dit « oh, fais attention » tout en me tirant le bras. J’ai demandé à mes amies bénévoles si elles aussi avaient remarqué un changement dans son discours, elles ont été toutes affirmatives, et m’ont dit que le discours de Paulette avait beaucoup évolué entre le 1er jour et le dernier jour.
Le Chant
En tant que professeur de voix, j’ai animé durant le séjour des ateliers « corps et voix » pour tous : malades, aidants et bénévoles se retrouvaient tous ensemble assis en cercle dans une grande salle et prenaient plaisir à bouger leur corps tout en chantant des voyelles, des vocalises ou des chants. Pour Paulette c’était un moment merveilleux, peut-être magique. Elle était rayonnante, s’amusait, chantait et communiquait sa joie d’être là au groupe. Ses « Gre re re re » s’harmonisaient fort bien avec l’ensemble du groupe rencontrant les Ha Ha Ha de Mauricette… une autre malade.
En dehors des ateliers voix, Paulette chantait très souvent dans un répertoire assez limité à « vive le vent, vive le vent, vive le vent d’hiver » mais dès que je lui chantais d’autres chansons connues elle partait dans une joie absolue et se mettait à chanter le refrain avec moi en tapant des mains et en bougeant son corps.
Les bisous
Paulette aimait me voir, elle me reconnaissait de loin et manifestait sa joie lorsque je m’approchais d’elle. Elle m’embrassait tout le temps, des centaines de fois par jour. Je suis nourrie pour des mois grâce aux baisers de Paulette ! Au début, lorsque je l’embrassais, je l’entourais de mes bras et lui tapotais le dos, très vite elle a fait la même chose et elle aussi s’est mise à me tapoter le dos avec délice et amusement.
L’énergie
J’ai ressenti une très belle énergie d’Amour qui accompagnait notre travail. Elle s’est amplifiée tout au long du séjour pour trouver son apothéose le jour où, lors d’un soin Reiki, j’ai ressenti durant quelques secondes que la maladie s’était effacée pour me laisser seule avec Paulette.
Conclusion
Un lien très fort s’est tissé entre Paulette et moi durant cette expérience. Un lien d’Amour Inconditionnel qui transcende tout et peut faire un pied de nez furtif à la maladie.
J’ai ressenti l’énergie Reiki tout au long de cette expérience, cette énergie qui amplifie notre propre capacité à se « guérir ».
Cette expérience fut pour moi extraordinaire et je remercie Paulette de m’avoir permis de l’accompagner tout au long de ce séjour.
Observations du conjoint de Paulette
Pendant le séjour
L’adaptation au nouvel environnement (chambre, lieux de promenade, restaurant) s’est faite facilement, vraisemblablement en raison même de ma présence, car Paulette se sent toujours en confiance quand je suis auprès d’elle. Son contact avec Sylvie a été excellent et elle a accepté rapidement que je m’éloigne d’elle pendant les repas ou les sorties promenades tout en étant contente de me retrouver le soir.
La nuit, son sommeil a été généralement bon, mais je ne peux faire de comparaisons avec son sommeil habituel dont je ne connais pas la qualité car elle est en institution. J’ai noté cependant après quelques nuits, qu’elle rêvait beaucoup, prononçant des phrases inintelligibles, et parfois, saisissant mon bras pour le caresser ou lui faire des bisous (nos lits étant côte à côte, mais suffisamment proches pour que cela soit possible). J’ai pu percevoir les mots « vivre, je ne sais pas ».
Ses réveils étaient calmes, très progressifs, et vers la fin du séjour, agrémentés de « gre, gre, gre … joyeux » quand elle était arrivée au plein éveil, juste avant que je la relève de son lit.
Pendant la journée, elle a recouvré progressivement quelques mots, et surtout, le début de la chanson « vive le vent d’hiver » dont elle ne faisait que fredonner l’air avant le séjour. Vers la fin du séjour, elle a pu dire « vous n’avez rien dedans, je vais le dire à maman», et s’adressant à moi « viens ici ».
Après le séjour
Le retour en institution s’est bien passé : Paulette a retrouvé son lieu de vie habituel avec satisfaction et fut très souriante avec l’aide soignante qui l’a accueillie elle aussi avec le sourire. Fatiguée du voyage après son coucher, elle s’est endormie vraisemblablement très vite. J’ai demandé par écrit à l’infirmière d’observer et de me faire connaître les changements éventuels du comportement de Paulette mais je n’ai encore eu aucun retour depuis le début de cette semaine. Simplement, une aide soignante m’a dit, deux jours après le retour « les vacances ont fait beaucoup de bien à votre épouse, elle est en pleine forme ! Elle pourra repartir ! »
(Vous pouvez contacter Sylvie à : yveslorand@numericable.fr)